Auteur/autrice : Nicholas Georgescu Roegen

Le schéma mécaniste en économie

Extrait de “Demain La Décroissance – Entropie – Écologie – Économie” de Nicholas Georgescu Roegen (Traduction de Jacques Grinevald et Ivo Rens)

Première partie – Le schéma mécaniste en économie

Il y a dans l’histoire de la pensée économique un événement bien curieux : des années après que le dogme mécaniste eut perdu sa suprématie en physique et son emprise dans le monde philosophique, les fondateurs de l’école néo-classique se sont mis à ériger une science économique sur le modèle de la mécanique pour en faire, selon l’expression de Jevons, « la mécanique de l’utilité et de l’intérêt individuel ». Et bien que la science économique ait beaucoup avancé depuis lors, rien de ce qui est intervenu n’a fait dévier la pen­sée économique de l’épistémologie mécaniste qui était déjà celle des ancêtres de la science économique orthodoxe. Lire la suite

La loi de l’entropie dans le processus économique

Extrait de “Demain La Décroissance – Entropie – Écologie – Économie” de Nicholas Georgescu Roegen (Traduction de Jacques Grinevald et Ivo Rens)

Deuxième partie – La loi de l’entropie dans le processus économique

Quelques économistes ont relevé que l’homme ne peut ni créer ni détruire de la matière ou de l’énergie, vérité qui découle du principe de conser­vation de la matière-énergie, autrement dit du premier principe de la thermodynami­que. Cependant nul ne paraît avoir été frappé par la question, si troublante à la lumière de cette loi: « Que fait alors le processus économique ? » Tout ce que l’on trouve dans la littérature économique usuelle, c’est une remarque deci-delà selon laquelle l’homme ne peut produire que des utilités, remarque qui ne fait en réalité qu’accentuer la difficulté. Comment est-il possible que l’homme produise quelque chose de matériel étant donné qu’il ne peut produire ni matière ni énergie ? Lire la suite

Le processus économique coûte plus qu’il ne produit

Extrait de  “Demain La Décroissance – Entropie – Écologie – Économie” de Nicholas Georgescu Roegen (Traduction de Jacques Grinevald et Ivo Rens)

Troisième partie – Le processus économique coûte plus qu’il ne produit

Grâce au mémoire de Carnot, le fait élémentaire que la chaleur s’écoule par elle-même du corps le plus chaud au corps le plus froid a acquis une place parmi les vérités reconnues par la physique. Plus important encore a été par la suite la reconnaissance de la vérité complémentaire suivante : une fois que la chaleur d’un système clos s’est diffusée au point que la température est deve­nue uniforme dans le système tout entier, la diffusion de la chaleur ne peut être inversée sans intervention extérieure. C’est ce qui arrive avec des cubes de glace dans un verre, qui, une fois fondus, ne se reformeront pas d’eux-mêmes. D’une façon générale, l’énergie thermique libre d’un système clos se dégrade continuellement et irrévocablement en énergie liée. Lire la suite

Le plaisir en tant que seul produit réel du processus économique 

Extrait de  “Demain La Décroissance – Entropie – Écologie – Économie” de Nicholas Georgescu Roegen (Traduction de Jacques Grinevald et Ivo Rens)

Quatrième partie – Le plaisir en tant que seul produit réel du processus économique 

Ce que nous avons dit plus haut du processus économique, à savoir que, d’un point de vue purement physique, il ne fait que transformer des ressources naturelles de valeur (basse entropie) en déchets (haute entropie) est donc parfaitement établi. Mais, il nous reste à résoudre l’énigme du pourquoi d’un tel processus. Et l’énigme subsistera tant que nous ne verrons pas que le véri­table produit économique du processus économique n’est pas un flux matériel de déchets mais un flux immatériel : la joie de vivre. Si nous ne reconnais­sons pas l’existence de ce flux, nous ne sommes pas dans le monde écono­mique. Lire la suite

L’activité industrielle libre de toute pollution est un mythe

Extrait de la “La Décroissance – Entropie – Écologie – Économie” de Nicholas Georgescu Roegen (Traduction de Jacques Grinevald et Ivo Rens)

Cinquième partie – L’activité industrielle libre de toute pollution est un mythe

La pensée économique a toujours été influencée par les problèmes écono­miques d’actualité. Elle a aussi reflété – avec un certain décalage – le mouve­ment des idées dans les sciences de la nature. Nous en voulons pour preuve le fait que, lorsque les économistes commencèrent à ignorer l’environnement naturel dans leur représentation du processus économique, cette évolution refléta un tournant dans la disposition d’esprit du monde intellectuel tout entier. Les réalisations sans précédent de la Révolution Industrielle avaient si bien impressionné tout le monde quant à ce que l’homme peut faire avec l’aide des machines que l’attention générale se confina sur l’usine. Lire la suite

Le déclin de la croissance est inéluctable

Extrait de  “Demain La Décroissance – Entropie – Écologie – Économie” de Nicholas Georgescu Roegen (Traduction de Jacques Grinevald et Ivo Rens)

Sixième partie – Le déclin de la croissance est inéluctable

Le globe terrestre auquel l’espèce humaine est attachée flotte, pour ainsi dire, dans un réservoir cosmique d’énergie libre, qui pourrait bien être infini. Mais, pour les raisons énumérées dans la section précédente, l’homme ne peut avoir accès à toute cette fantastique réserve d’énergie libre, non plus qu’à toutes les formes possibles d’énergie libre. L’homme ne peut, par exemple, puiser directement dans l’immense énergie thermonucléaire du soleil. Le plus grave obstacle (valable aussi pour l’usage industriel de la « bombe à hydro­gène ») réside dans le fait qu’aucun récipient matériel ne peut résister à la température de réactions thermonucléaires massives. De telles réactions ne peuvent avoir lieu que dans un espace libre. Lire la suite

L’improbable équation de l’avenir

Extrait de  “Demain La Décroissance – Entropie – Écologie – Économie” de Nicholas Georgescu Roegen (Traduction de Jacques Grinevald et Ivo Rens)

Septième partie – L’improbable équation de l’avenir

La conclusion est évidente. Chaque fois que nous produisons une voiture, nous détruisons irrévocablement une quantité de basse entropie qui, autrement pourrait être utilisée pour fabriquer une charrue ou une bêche. Autrement dit, chaque fois que nous produisons une voiture, nous le faisons au prix d’une baisse du nombre de vies humaines à venir. Il se peut que le développement économique fondé sur l’abondance industrielle soit un bienfait pour nous et pour ceux qui pourront en bénéficier dans un proche avenir: il n’en est pas moins opposé à l’intérêt de l’espèce humaine dans son ensemble, si du moins son intérêt est de durer autant que le permet sa dot de basse entropie. Au travers de ce paradoxe du développement économique, nous pouvons saisir le prix dont l’homme doit payer le privilège unique que constitue sa capacité de dépasser ses limites biologiques dans sa lutte pour la vie. Lire la suite